jeudi 24 mars 2011

La beauté de la mousse

Tofuku-ji à Kyoto - août 2010

Très belle interview de Philippe Picquier dans Télérama du 23 mars :
“Les Japonais cherchent la posture la plus harmonieuse devant l'inéluctable.”

Défricheur de littérature asiatique, l'éditeur Philippe Picquier explique la dignité des Japonais face à la catastrophe par leur conception du monde. Pleine de sagesse.

C'est en Arles, au Mas de Vert, que Philippe Picquier dirige une maison d'édition à son nom, entièrement consacrée aux littératures d'Extrême-Orient. Au commencement, en 1986, sans parler un seul mot de japonais ni de chinois, il se prit de curiosité pour les romans écrits dans ces deux langues, et défricha des pans de littérature inconnus. C'est lui qui fit connaître des auteurs comme Ryû Murakami (Les Bébés de la consigne automatique) ou Yan Lianke (Le Rêve du village des Ding). Ses proches le disent souvent « plus japonais que les Japonais », à cause de sa pudeur extrême, de sa sérénité mystérieuse, de sa réserve tenace. Philippe Picquier reconnaît que la découverte du Japon a totalement changé sa façon de voir le monde...

Vous êtes en contact quotidien avec vos auteurs japonais. Comment réagissent-ils à la catastrophe qui s'est abattue sur leur pays ?
Tous sont très inquiets mais, pour l'instant, aucun ne veut partir. Une amie japonaise me disait qu'elle restait parce qu'on avait « besoin d'elle ». Je suis frappé par la cohésion sociale très forte au Japon. La population ne fait aucune confiance au gouvernement, à cause de quarante ans de corruption au pouvoir. Mais les Japonais ont une idée très particulière de l'Etat et de la participation citoyenne à la vie. La solidarité est intense et implicite. Chacun se sent concerné par l'autre, tous partagent une même façon de regarder le monde. C'est pourquoi vous ne verrez jamais aucune scène de pillage, d'hystérie collective.

“Les Japonais ne construisent pas
des cathédrales mais des jardins...”

L'extrême dignité du peuple japonais a marqué tous les esprits...
Ce qu'on perçoit, c'est qu'ils savaient que ça allait arriver. Ce n'est pas du fatalisme, ni de la résignation. Juste l'acceptation de quelque chose d'incontrôlable. La menace du tremblement de terre fait partie de leur vie, dès la naissance. Il suffit de fermer sa porte d'hôtel, lorsqu'on voyage au Japon, pour s'en rendre compte : les instructions en cas de séisme y sont systématiquement affichées. La dignité des Japonais leur est donc profondément naturelle, et ils n'imaginent pas qu'elle puisse forger de l'admiration.

...
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"Les Japonais ne construisent pas des cathédrales mais des jardins..."
Kenroku-en à Kanazawa - août 2010
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...toutes mes pensées pour les Japonais...
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